Les découvertes humaines que j'y ai faites sont irremplaçables, multiples, ouvertes sur l'avenir...
L'autre jour, je marchais dans une rue d'Evry, quand une grosse voiture noire, vitres teintées, s'est arrêtée à côté de moi. La vitre s'est ouverte et un jeune homme d'une vingtaine d'années m'a appelée:
"Arlette??"
Alors il faut que je vous dise, Arlette, c'est ma copine, celle avec laquelle, quand on avait 35 ans, instits en maternelle, on a "ouvert" une école dans un quartier, maintenant "classé ZEP" de cette ville nouvelle.
C'était le nom qu'on leur donnait, avec un certain cynisme de la part des concepteurs je trouve. Elles n'avaient pas grand chose de villes, pas de vie, pas d'histoire, du béton pensé esthétiquement, dont on pensait que des intentions intellectuelles suffiraient à en faire des lieux de vie.
La réalité commençait déjà, à l'époque, à prouver que ce n'était pas si simple.
Mais nous, Arlette et moi entre autres, nous étions projetées dans ces écoles, avec la mission de faire de bons citoyens instruits de tous ces petits enfants qui nous étaient confiés et pour lesquels, déjà, l'avenir était plutôt incertain.
Alors on a pris les choses à bras le corps, avec du désir, l'envie de vivre, d'échanger, de faire de toutes ces histoires de vie quelque chose d'enthousiasmant. Les mamans turques, maghrébines, africaines étaient contentes de venir chercher leurs enfants à la sortie, et elles restaient tard à l'école. On parlait, on riait, on dansait même parfois avec elles.
Elles arrivaient à quatre heures et demie avec des spécialités culnaires de leurs régions, étaient contentes de nous les faire découvrir, elles faisaient des progrès en français, nous pas trop dans leurs langues, il y en avait trop...
La directrice de l'école n'aimait pas ça du tout. Elle nous accusait de faire du copinage avec les parents, de ne pas nous comporter en professionnelles, c'était peut-être vrai... mais c'était bien.
Et donc l'autre jour, quand ce grand garçon m'a appelée Arlette, j'ai répondu en souriant:
"Non, Pascale..."
C'était un peu mélangé pour lui, forcément, une année chez l'une, une année chez l'autre, puis retour...
"Ah, oui, Pascale, vous n'avez pas changé..."
Alors ça, c'est gentil, 15 ans, quand même!!!
"Vous vous souvenez de moi?
- Ben, vous par contre, vous avez changé, comment vous appelez-vous?"
Je ne le vouvoyais pas à l'époque...
" Serkan.
- Ah, oui bien sûr (je l'ai revu, tout petit, à 5 ans)! Et qu'est-ce que tu deviens?
- Ben j'ai fait un BTS de commerce et je travaille dans l'entreprise de mon père, de l'électricité... J'ai gardé un bon souvenir de l'école, je suis content de vous revoir."
Nous avons échangé quelques mots, nous nous croiserons probablement encore... il a fait beau ce jour-là.
Et j'ai découvert un petit supermarché turc à Evry peu de temps après, et en souvenir de toutes ces mamans-là, à qui je n'avais pas demandé leur recettes, j'ai eu envie de les chercher, et j'ai trouvé de belles choses, en particulier sur le blog Délices de Turquie et d'ailleurs.
Je les ai adaptées pour en faire ces petits pains, délicieux, et réalisables avec les ingrédients d'origine ou d'autres, plus faciles à trouver ici.

600g farine
1 pincée de sel
100 ml de lait tiède
200 ml d'eau tiède
1 sachet de levure de boulanger ou 15 g de levure fraîche
1/2 c. à c. de sucre
600g de fromage (voir note)
Quelques tranches de chorizo
Dans un bol, mélangez le lait, l'eau, le sucre et la levure. Laissez reposer environ 10 minutes jusqu'à ce que la levure bulle.
Dans un grand saladier, verser la farine et le sel. Ajoutez le mélange à base de levure et pétrissez jusqu'à obtention d'une boule de pâte.
Couvrez le saladier d'un torchon et laissez la pâte gonfler pendant environ 40 minutes.
Pendant ce temps, râpez le fromage.
Quand la pâte a doublé de volume, découpez-la en 6 pâtons égaux.
Etalez chaque pâton en rectangle. Déposez au milieu 4 tranches de chorizo en les superposant légèrement. Couvrez de fromage rapé. Rabattez la partie inférieure sur la garniture, puis la partie supérieure pour bien l'enfermer. Appuyez fermement avec la paume des mains pour souder, scellez les extrémités pour former de petits pains longs.
Posez-les sur une plaque garnie de papier sulfurisé, couvrez d'un torchon et laissez
lever une demi-heure.
Faire cuire au four préchauffé à 220°c pendant environ 20 minutes.
Servez avec une salade et ici, avec une salade de carottes au yaourt dont je vous donnerai la recette bientôt.
Pour le fromage: celui que j'ai trouvé se nomme Kasar Peynir. Il est à base de lait de brebis mélangé à du lait de vache, à pâte dure. On peut très bien le remplacer par du gruyère ou de la mozarella, ou mieux, un mélange des deux.
Le chorizo turc se nomme Sucuk. Il présente asez peu d'intérêt cru, mais dévoile ses saveurs en cuisant. Je vais essayer de l'utiliser en omelette ou dans des riz assaisonnés. On le trouve, dans les épiceries turques, soit sous forme de petites saucisse, soit prétranché pour le mettre sur les pizzas ou les omelettes.
Vous pouvez évidemment le remplacer par du (bon!) chorizo.
La pâte à pain préparée de cette façon a un moelleux vraiment fabuleux!
Et un petit clin d'oeil à nos
banlieues.