16 Juin 2015
Dix jours en Louisiane en avril. Qu'est-ce que je peux partager avec vous?
Je pourrais commencer par la fascination première pour la route américaine,
Celle qu'on a vu des milliers de fois sur des écrans, dans les road trips des frères Coen ou de Wim Wenders, mais que pour la première fois, on a là devant nous...
Ou par ces big trucks qui font penser au Duel de Spielberg qui nous terrorisait au siècle dernier? (Mais là, on n'était pas tout seuls, on était quatre dans notre Jeep cherokee!)
Et cet incroyable restaurant le premier soir, le Regatta au bord du Lake Charles...
, avec des jeunes filles aux robes dignes de princesses Disney, et des garçons en smoking blanc et chemise bleu électrique, en pleines 80's!
Avec orchestre cajun, chansons en français!
Ou sinon, ma première dégustation d'alligator, en saucisses, accompagnées de choucroute et de moutarde à l'ancienne
sous le regard attentif du responsable de salle, un Leonard di Caprio qui aurait pris 30 kilos...
Mon émerveillement aussi devant le café servi à volonté au petit déjeuner dans des pots ronds, comme dans Pulp Fiction (sans Tim Roth et Rosanna Arquette poussant des hurlements hystériques)
Plus loin, les paysages des bayous dignes de Tim Burton
On n'est pas dans Sleepy Hollow, mais ce personnage peu sympathique pourrait en faire partie...
Les quartiers du centre de la Nouvelle Orléans où on joue du jazz partout et à toute heure,
On se sent pensifs dans le vieux quartier de Treme, le quartier noir de NOLA (New Orleans pour les intimes), qui a vu naître le jazz (et toute la musique de l'Amérique, disent les amoureux de la ville), et souffert plus que les autres de l'ouragan Kathrina. Il peine à être reconstruit, laissé à l'abandon par les pouvoirs fédéraux, comme ils l'avait été auparavant, ou alors par des investisseurs venus d'ailleurs qui y font grimper les loyers, interdisant aux habitants premiers d'y revenir.
Si vous n'avez pas vu la série Treme, je vous la conseille, on vit avec eux la reconstruction avec ses difficultés et les questions que cela pose.
Les plantations? Non, ça je n'en parle même pas, tant le traitement du sujet uniquement axé sur la magnificience des logements des planteurs, et l'esclavage traité comme un sujet anecdotique, m'a dérangée.
Il faut que j'y retourne pour visiter la plantation Whitney, qui vient d'ouvrir un musée sur l'esclavage, et que j'ai ratée de peu.
Le mississipi alors?
Avoir l'impression de s'asseoir au bord de l'eau à côté de Faulkner, avec Tom Sawyer envisageant de fuir vers des auspices plus accueillants, et James Lee Burke pas très loin...
Et The ghost of Tom Joad peut-être? Ah, non, l'Oklahoma, ce n'est pas ici, mais si j'ai envie d'y croire d'abord? Bruce n'est jamais loin...
Ou plein d'autres choses encore...
Ces maisons incroyablement fantomatiques sur des pilotis immenses, attendant de pilier ferme la prochaine tempête
Rien que pour revoir cette inventivité des paysages urbains,
on reviendra...
Mais aussi pour la cuisine louisianaise!
Allez, pour vous remercier d'avoir fait ce bout de route avec moi, je vous invite à un délice gustatif, qui vous donnera envie d'y aller, ou d'y retourner!
Comme à chaque fois que je visite un pays (et à condition que je me débrouille un minimum avec la langue locale), j'ai acheté un magazine de cuisine de tous les jours, familiale, ce qui permet de voir comment la cuisine évolue localement. C'est de celui-là que je me suis inspirée pour cette recette.
J'ai eu aussi la surprise de trouver un livre de cuisine traditionnelle, plutôt littéraire écrit par Lafcadio Hearns, plus connu pour ses nouvelles fantastiques, mais je n'ai pas encore eu le temps de l'explorer vraiment, je vous en reparlerai.
Cette enchilada se fait avec de la viande de porc fumée. Comme j'ai la chance de posséder un fumoir, j'ai procédé moi-même au fumage, mais si vous n'en avez pas, deux solutions:
- vous utilisez de la viande déjà fumée, on en trouve en grande surface, mais le résultat sera moins bon puisqu'elle sera fumée sans les épices
- vous vous servez d'un wok disposant d'une grille pour poser les aliments et dont le couvercle ferme bien, c'est important pour la suite. Et vous en tapissez le fond de papier alu, pour éviter le nettoyage ensuite, très fastidieux quand les copeaux de bois ont brûlé, le fumage se faisant à chaud, contrairement à la mozarella fumée dont j'avais farci des fleurs de courgette (miam!!!) il y a deux ans.
Action!
Smoked pork enchilada
Pour 5 à 6 personnes
Pour le porc fumé
500 g d'échine de porc
2c.à s. de paprika
1 c. à s. de sucre roux
2 c. à c. de sel
1 c. à c. d'ail en poudre
1 c. à c. de poivre noir
1 c. à c. de sel de céleri
1/4 c. à c. de piment rouge
Pour l'enchilada
125 g de cheddar râpé
30 cl de bouillon de volaille
1 piment vert frais
1 c. à c de cumin en poudre
1 gousse d'ail hachée
8 tortillas au maïs
250 g de crême fraîche épaisse
Pour la garniture: radis roses, coriandre fraîche, tiges d'oignons verts ou ciboulette
Procédez au fumage du porc:
Mélangez dans un bol toutes les épices. Réservez 3 c. à c. de ce mélange à part.
Découpez la viande en lamelles de 1/2 cm d'épaisseur et ajoutez-les au reste du mélange d'épices, enduisez bien tous les morceaux, filmez et laissez reposer une heure au moins au réfrigérateur.
Dans le fond du fumoir, disposez quelques petits tas de copeaux de hêtre ou de chêne spécial fumage alimentaire de la valeur d'une cuillère à soupe. Déposez sur chaque tas une cuillerée d'épices.
Posez le couvercle et mettez à chauffer sur feu moyen. Quand cela commence à devenir odorant, au bout de dix minutes - un quart d'heure, éteignez le feu et laissez le fumage s'opérer - sans ouvrir le couvercle! - pendant au moins 20 minutes, ou plus selon l'intensité du goût fumé qui vous convient.
Préchauffez le four à 180°C.
Huilez le fond d'un moule à gratin.
Disposez 4 tortillas sur le fond du plat en les laissant dépasser sur les bords (celles-là n'étaient pas au maïs, erreur d'approvisionnement, la fois suivante, on a fait attention).
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Enfournez pour 20 à 25 minutes. Servez en décorant des radis en fines rondelles, de coriandre, de tiges d'oignons verts émincées ou de ciboulette ciselée.
Régalez-vous, c'est divin!