Si vous avez envie d'aller voir un film rafraichissant, joyeux et pas idiot, le voià!
Et c'est même un peu plus que ça.
Réalisé et joué par des anciens du Jamel Comedy Club, Amelle Chahbi et Noom Diawara, j'avoue que la bande annonce m'avait laissée pas dubitative, mais pleine de questions: une comédie au rythme accéléré mais abordant quoi exactement? La drague entre trentenaires de banlieue? Moyennement mon truc... La rapidité de dialogue décalés et traités dans la dérision? Pourquoi pas?
J'aime bien ce que fait Jamel Debbouze en one man show, il est pour moi le digne descendant de Coluche, savoir mettre les mots de façon percutante sur les maux les plus douloureux de notre société sans se prendre au sérieux.
Ces deux-là avaient-ils le même talent?
Voyons voir...
Pendant les dix premières minutes, je me suis dit que je n'étais vraiment pas dans le public cible. J'habite en banlieue et mes enfants (qui ont à peu près l'âge des protagonistes) ont affecté ce langage pendant leur adolescence, ce qui m'énervait au plus haut point mais il fallait bien sacrifier aux rites grégaires de la période. J'en ai conservé un sens de l'humour assez limité sur cette forme d'expression, et sur les échanges qu'elle implique, qui me semblent assez irrespectueux de l'interlocuteur.
Mais passons sur mes a priori névrotiques.
Le rythme mis en valeur dans le B.A. n'habite pas tout le film qui souffre parfois d'un essoufflement. Genre: on sprinte, on s'arrête pour regarder le paysage, et c'est parfois un peu lassant.
Ce que j'en garde, c'est que Noom et Amelle (les personnages portent les noms des acteurs...) ont l'air de s'amuser comme des petits fous en reprenant leurs rôles dans la pièce de théâtre à succès dont est tiré le film, et qu'ils abordent un sujet encore peu traité: la difficulté quand on est de la deuxième (ou troisième...) génération d'immigrés, qu'on est né en France, et qu'on vit dans ce riche melting pot qu'est la banlieue, ici parisienne, de présenter sa chérie arabe à ses parents quand on est noir, et réciproquement.
Donc le racisme qui existe entre ces communautés qui parfois se haïssent, sur les mêmes bases de préjugés que tout racisme, mais qui ici s'exacerbe puisqu'il s'agit d'alliances de la chair de sa chair avec l'ennemi, donc place au chantage sentimental: "Tu vas tuer ton père" et aux mises en garde des aïeuls reconnus pour leur grande sagesse et dont il serait insensé de contredire ou de ne pas respecter les préceptes.
Le choix est rude, sans doute très douloureux, mais ici c'est l'humour et cette dérision qui permettent de tenter de surmonter ces obstacles.
Et finalement, j'ai mieux compris que ce langage-là s'est construit, et c'était sans doute une question de survie, par des jeunes qui avaient besoin de codes de survie et de reconnaissance dans une société hostile. Ils se sont créé les leurs et les ont fait évoluer, ils sont capables aujourd'hui de comprendre le monde qui les entoure et d'y jouer un rôle de manière beaucoup plus complexe et rapide que les caricatures dont on se contente parfois en donnent l'impression
Donc verdict: pas mal.
De vraies questions, qui je l'espère, donneront envie d'aborder le thème encore, peut-être avec un fond différent. Ils ont la pêche, ils en sont capables, on les attend.